samedi 19 décembre 2009

A se damner...et se ruiner!


Grubi-boulga

http://www.concertonet.com/scripts/review.php?ID_review=6125

Où l'on apprend que "L’air «Spargi d’amaro pianto...», rejoué en bis (avec un manque de souffle qui provoqua quelques mouvements), fut d’un naturel et d’une délicatesse à l’évidence supérieurs."

C'est seulement qu'il y eut des applaudissements nourris entre le début de la scène de la folie et la cabalette "Spargi d'amaro pianto"...qui n'a aucunement été rejoué!

Où l'on apprend aussi que les jeunes chanteurs étaient "excellents"...A part la mezzo, ce n'est pas vraiment ce que j'ai trouvé, loin de là!

Bienvenue dans la 4ème dimension

- Daddyyyyyyyyyyyyyyyyyyyyyyyyyyyyy!
(blanc)
- Wouaf wouaf!
(blanc)
- Open the gaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaates! Ooooooooooopen them!
(blanc)
- Aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaah!
(blanc)
- (rires dans la salle)
(blanc)
- (musique bien américaine)
(blanc)
Voilà tout ce qu'il me reste de 2012 au cinéma ce soir. Tout compte fait, j'ai dû bien dormir!

vendredi 18 décembre 2009

En lorgnant dans l'assiette de mon voisin...


Ca n'a pas l'air mal non plus: citron - crème - romarin


Nastri pomodoro zucchini e olive nere


...un délice!

Flânerie sous la neige







Paris sous la neige, avec cette lumière froide si caractéristique, pour laquelle les bâtiments classiques semblent avoir été construits...en écoutant Lisa della Casa chanter Strauss...que demander de mieux?










Phénoménale Grubi (récital Edita Gruberova, Théâtre des Champs-Elysées, 17 décembre 2009)




Mozart : Le Directeur de théâtre, ouverture
"Martern aller Arten", air de Konstanze (Entführung aus dem Serail)

Wolf-Ferrari : I Quattro Rusteghi, Vorspiel et Intermezzo
Il segreto di Susanna, ouverture

Donizetti : "Il dolce suono", "Spargi d'amaro pianto" (Lucia di Lammermoor)

Chapi : Preludio de la Revoltosa

Bellini: "Oh, s'io potessi", "Col sorriso", "Oh sole, ti vela" airs d'Imogene (Il Pirata)

Donizetti : Roberto Devereux, ouverture
"E Sara, in questi orribili", "Vivi, ingrato", "Quel Sangue" airs d'Elisabetta (Roberto Devereux)

bis: Air d'Adele (Johann Strauss, Die Fledermaus), cavatine de Linda di Chamounix (Donizetti), de nouveau l'air d'Adele.



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Il est des concerts où l'on va sans trop savoir à quoi s'attendre, avec un mélange de curiosité (parfois même malsaine!), et de crainte. Curiosité de voir une artiste, Edita Gruberova, qui fait partie des derniers "dinosaures" d'une génération de (quasi-) monstres sacrés, et est rare en France (sa dernière apparition parisienne remontant à un concert de duos avec Vesselina Kasarova en 1999) - sa carrière évoluant essentiellement dans le monde lyrique germano-autrichien et espagnol, où elle est une véritable star. Curiosité malsaine, Beckmesser ayant des a-prioris sur l'artiste en question, supposée de mauvais goût, alternant miaulements et aigus pris par en-dessous, s'attaquant à des rôles trop larges pour sa petite voix de chouette, le tout en minaudant de façon totalement ringarde! Curiosité bienveillante aussi, de voir des amis qui comptent vraiment vouer une admiration sans bornes à cette artiste, et d'essayer d'en décortiquer les raisons, objectives ou non. Curiosité amusée de voir le spectacle dans la salle, et partant de là, un décalage supposé entre cette atmosphère qui promettait d'être électrique, et la qualité réelle de ce que proposerait la chanteuse. Craintes du coup de voir une artiste de 63 ans accuser d'un coup le poids des ans en s'imposant un programme trop lourd, trop long, trop difficile pour elle.



Car il faut une sacrée dose d'inconscience pour composer un tel programme, sans aucun tour de chauffe, commençant par le meurtrier "Martern aller Arten" de l'Enlèvement au Sérail, pour continuer sur des terres italiennes (jugées moins idiomatiques pour la chanteuse) avec des scènes entière, scène de la folie de Lucia, d'Imogene, scène finale de Roberto Devereux. Un tel programme, en soi, est déjà exceptionnel; mais à 63 ans! C'est proprement prodigieux. Mais ce côté prodigieux n'aurait été qu'anecdotique (ou au contraire, aurait desservi la chanteuse) s'il n'était pas totalement maîtrisé, avec un aplomb, une autorité, un métier et un engagement bluffants! Pas à un seul moment, on a l'impression de voir la chanteuse s'économiser pour la suite du programme, bien au contraire!



Dès son arrivée sur scène, Edita Gruberova montre tout son métier. On la sent stressée, tendue, devant les attentes des spectateurs, devant un public français si longtemps frustré de son absence. Eh bien elle réussit à sublimer ce stress bien légitime, à le transformer en énergie positive. Sa Konstanze initiale est donc d'un volontarisme et d'une autorité inouïes. Et dès les premières notes, c'est le choc: la voix n'a absolument rien perdu, ou presque rien, elle est d'une santé époustouflante; la projection est prodigieuse, la voix remplit sans aucune difficulté la salle, bourdonne dans les oreilles des spectateurs, prend mille couleurs, mille inflexions différentes, l'interprète prend des risques incroyables, comme ces notes aiguës attaquées pianissimo puis enflées progressivement, les vocalises n'ont rien perdu de leur précision horlogère, l'intonation est tout à fait juste; on retrouve la grande mozartienne qu'est à la base Gruberova, en lui pardonnant aisément son absence de graves.

Le programme se poursuit par une scène de folie de Lucia qui balance au début entre une volonté louable de sobriété, un effort sur le texte, les accents (avec des notes volontairement "droites"), et un expressionnisme jamais outrancier cependant; toutes les (légères) réserves se trouvent balayées par un dialogue proprement époustouflant avec la flûte, où les deux instruments (parce que là, la voix de Gruberova se fait totalement instrumentale) s'imitent et se croise avec une complicité étourdissante. L'aigu et le suraigu sont cristallins et l'on est totalement suspendu aux lèvres de la chanteuse. Le public exulte à juste titre, ne laissant pas (et c'est presque dommage, tant il y avait une énergie particulière) la chanteuse enchaîner directement sur la cabalette "Spargi d'amaro pianto", enlevée avec brio mais, par la force des choses, détachée du reste de la scène.



La scène de folie d'Imogene était peut-être le moment le moins réussi de la soirée, mais quelle maîtrise tout de même dans une scène meurtrière qui a emporté plus d'une cantatrice, ou à défaut, frustré plus d'un spectateur. Le langage de Bellini est peut-être celui qui convient le moins à la cantatrice, prise (légèrement) en défaut de ligne de chant dans la cantilène initiale - mais quel métier pour venir à bout, et sans difficulté apparente, de cette scène! Et quelle différence avec un extrait sur youtube de la même chanteuse, un an auparavant à Bratislava, qui multipliait erreurs de justesse et écartements stylistiques coupables! A défaut d'adéquation parfaite, la maîtrise est sidérante.

Le concert culmine (enfin, croit-on) avec une scène finale de Devereux pour laquelle la cantatrice s'est adjoint sympathiquement les services de trois jeunes chanteurs, dont nous ne retiendrons que Julie Gautrot, mezzo-soprano à la présence prometteuse. Tout le personnage d'Elisabetta se dévoile sous nos yeux, déchiré, désespéré, et balaie peu à peu les dernières réticences que nous avions. Que la voix sonne large pour une voix aussi à l'aise dans l'aigu! Les nuances piano ne sont en rien des miaulements gratuits, mais ont vraiment un sens dramatique très réfléchi. Et "quel sangue versato" est bouleversant d'émotion, d'impact, de précision, en bref, rend totalement justice à cette page qui tire déjà vers Verdi.

Le délire est total dans la salle et on ne sait qu'admirer le plus chez cette chanteuse: son métier incroyable, sa générosité à toute épreuve, l'impact sidérant de sa voix, sa santé époustouflante pour son âge et au vu de sa carrière, sa technique proprement phénoménale qui lui permet de prendre des risques insensés...pourquoi choisir? C'est cette combinaison de qualités qui font qu'on a l'impression de se trouver devant un "monstre sacré", témoin d'une époque révolue, celles des "divas", enchantant le public par la seule force de leur chant, et non par leur physique de pin-up doublé d'un marketing offensif et ravageur (des exceptions existent qui allient les deux, mais n'est pas Netrebko qui veut).



Un deuxième concert commence une fois le corps du programme effectué. La salle est debout, les fans se font de plus en plus bruyants, interpellent la Diva, lui demandant de revenir au plus tôt à Paris. En guise de bouquet final, la cantatrice nous montre une autre facette de son talent en faisant rire la salle aux éclats dans un air d'Adele (dans la Chauve-Souris de Johann Strauss)hilarant, désopilant, plein de cet esprit viennois si particulier.

Nous n'en avons hélas enregistré que le début:



S'en suivit la cavatine de Linda di Chamounix de Donizetti, irrésistible, avec son passage rapide ("O luce di quest'anima") où Gruberova fit valoir toute sa science des vocalises perlées, détaillées avec une grande gourmandise.



Et pour la fin, à la demande de Dominique Meyer, l'ancien directeur du TCE et nouveau directeur de la Staatsoper de Vienne, véritable seconde maison de "Grubi", une deuxième fois l'air d'Adele, où la chanteuse fait valoir son immense métier: pas à un seul moment, le spectateur n'a l'impression d'entendre le même air! Toujours aussi hilarante, Gruberova "s'attaque", après le premier violon, à un violoncelliste, qu'elle remercie chaleureusement par la suite. La salle est aux anges, presque tous les spectateurs sont debout, spontanément, pour honorer une sacrée artiste!

Voici la fin de cet air:



L'orchestre d'Oviedo, dirigé par "Monsieur Gruberova", Friedrich Haider, sonne plutôt pas mal, accompagne bien cette soirée, nous gratifiant pour une fois dans ce genre d'exercices, d'intermèdes orchestraux plutôt originaux, la direction d'orchestre, un peu molle et conventionnelle au début, se faisant plus affirmée, plus stylée, au fur et à mesure de la soirée. Quelle belle image que cette complicité amoureuse entre la chanteuse et le chef!





Une soirée décidément inoubliable, où les quelques réserves "d'usage" (ports de voix, attaques par en-dessous, idiomatisme parfois discutable en italien...) sont très largements balayés par une générosité et une maîtrise proprement admirables! Grubi est décidément inoxydable!



mercredi 16 décembre 2009

Une "Bohème" à faire pleurer les pierres (TCE, version de concert, 15 décembre 2009)



Asher Fisch, direction
Anja Harteros, Mimi
Vittorio Grigolo, Rodolfo
Elena Tsallagova, Musetta
Levente Molnar, Marcello
Christian Rieger, Schaunard
Christian van Horn, Colline
Alfred Kuhn, Benoît
Rüdiger Trebes, Alcindoro
John Chest, un douanier
ll Hong, un sergent des douanes
Nam Won Huh, Parpignol
Orchestre de la Bayerische StaatsoperChoeur de la Bayerische Staatsoper, direction Andrés Máspero
Maîtrise de Radio France, direction Sofi Jeannin
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Il est des soirées que l'on attend avec un peu d'impatience et de curiosité, mais d'où l'on ressort totalement chamboulé. Celle du 15 décembre en fait partie. J'étais curieux de découvrir Anja Harteros en live, impressionné que j'étais par des extraits de son Elsa avec le Lohengrin de Jonas Kaufmann, de son Amelia Grimaldi avec Domingo à Berlin, ou de l'enregistrement du Requiem de Verdi avec Antonio Pappano. Dans une moindre mesure, j'attendais beaucoup de Vittorio Grigolo, jeune ténor qui monte, remarqué pour un beau Germont à Orange cet été, aux côtés de la Violetta jusqu'au boutiste de Patrizia Ciofi.
De la première à la dernière note, j'ai été totalement happé par cette représentation (et la Bohème en version de concert, c'est une sacrée gageure!) pleine de vie, de contrastes, de joie communicative de faire de la musique. Le chef d'orchestre Asher Fisch avait de l'enthousiasme à revendre, et pas seulement: quelle clarté dans la texture orchestrale de l'Opéra de Bavière! Quel sens des couleurs! Quel lyrisme! Quelle attention aux chanteurs! Une direction d'orchestre en tous points magnifique, enlevée, émouvante, entraînant les chanteurs dans un même mouvement.
Tous les chanteurs étaient concernés de la première à la dernière note. Des seconds rôles nous retiendrons essentiellement le Colline exceptionnel de Christian van Horn, à la ligne de chant et au mordant incomparables. Elena Tsallagova donne à Musetta sa jeunesse, son enthousiasme, son insolence, dans un portrait très réussi et jamais outrancier. Quant à Vittorio Grigolo, s'il séduit par ses élans juvéniles, son sens des nuances, il déconcerte par une tenue de souffle très particulière, "en accordéon" (des sons très enflés puis retenus), et inquiète par une certaine propension à forcer et à crier ses aigus; ainsi l'air du I ("Che gelida manina"), chanté dans le ton, le met à mal pour la suite de l'opéra. Ajoutons à cela une tendance un peu irritante à cabotiner, que ce soit sur scène ou aux saluts.
Mais la vraie triomphatrice de la soirée est sans conteste aucun Anja Harteros. La soprano allemande montre qu'elle est une des toutes grandes. Retenez-bien son nom! Une palette de couleurs incroyablement variée, du sombre au très clair, une facilité d'émission, une puissance vocale, une homogénéité remarquable sur toute la tessiture, de l'aigu très rond au grave jamais poitriné, et surtout ce qui distingue une bonne chanteuse d'une très grande: ce (grand) plus qui fait naître une émotion indescriptible. J'avais les larmes aux yeux dès son air du I ("ma quando vien lo sgelo" interprété avec un élan irrésistible), alors imaginez le III et le IV qui m'ont laissé complètement abasourdi par cette Mimì qui n'est en rien une soubrette, ni une victime. Quelle classe sur scène! Impossible de ne pas chavirer d'émotion et d'admiration devant une artiste aussi indispensable. Comment se fait-il qu'elle soit si rare à Paris?

Décidément, les versions de concert du TCE sont absolument exceptionnelles cette année, après Wozzeck, l'acte II de Tristan, et Don Pasquale. Jamais je n'aurais cru prendre davantage de plaisir dans des versions de concerts qu'en salle avec une "mise en scène", et pourtant...

Sublime Jonas Kaufmann




Qui d'autre que Jonas Kaufmann, LE ténor du moment, pour interpréter cette page si courte et si difficile en même temps, "pont" entre le chant italien et le chant allemand? Quelle vaillance, quel sens du phrasé, quelle insolence dans les aigus, quelle beauté vocale! Un immense moment, sur le vif à Baden-Baden en 2009.

lundi 14 décembre 2009

dimanche 13 décembre 2009

Parce que c'est aussi de la "culture"...

P'Annick Massis (TCE, 4 décembre 2009)

Un bis raté d'un récital raté. Triste. N'Annick nous doit une revanche!

THE Verdi Tenor? Non, A Verdi Tenor (Récital Marcelo Alvarez "The Verdi Tenor")

Airs d'opéras de Verdi, extraits de Aida, Un ballo in maschera, Luisa Miller, La forza del destino, Il Trovatore, I Lombardi, Ernani, Don Carlo, Macbeth et Otello.

Programme ambitieux, alléchant mais "légèrement" commun pour le nouveau récital Verdi du ténor argentin Marcelo Alvarez. Un titre assez prétentieux également, pour lequel il faut blâmer certainement davantage la firme Decca que l'artiste, qui est "un" ténor verdien parmi d'autres, mais certainement pas "le" ténor verdien, même du moment.
Verdien? Je tendrais davantage à qualifier Marcelo Alvarez de chanteur "vériste", tant l'imprécision de certaines attaques, la surcharge de certains aigus, le côté appuyé de certains effets, renvoient à une esthétique qui n'est pas tellement verdienne. Au rayon des ténors, un Stefano Secco avec sa tenue stylistique irréprochable (notamment en Gabriele Adorno et surtout Don Carlo), paraît davantage mériter l'appellation "verdienne".
Mais évidemment, Marcelo Alvarez déploie dans ce récital de belles qualités: celles qu'on lui connaît, évidemment, le charme dans la voix, la couleur solaire, la musicalité, les nuances, le phrasé qui se déploie par exemple dans le "Ah si, ben mio" du Trouvère, la diction aussi. Il est en cela bien soutenu par Daniel Oren qui connaît cette musique par coeur.
Mais d'où vient cette légère frustration qui m'a envahi en écoutant ce récital? Du style, davantage vériste que verdien, je l'ai déjà dit; mais aussi d'une propension à pousser ses moyens, qui sont ceux d'un ténor lyrique, et de forcer sa voix, au risque de perdre ses qualités de timbre...Il suffit d'écouter les premières mesures de Celeste Aida pour se rendre compte que l'habit est trop large pour le chanteur. Le programme même du disque est en cause: Luisa Miller, Un ballo in maschera, Macbeth et I Lombardi paraissent des limites à ne pas dépasser pour le ténor.
Las! Il vient d'effectuer une prise de rôle très dangereuse en Andrea Chénier, qui plus est dans l'immense salle de l'Opéra Bastille. Et si le programme de ce récital reflète la volonté du chanteur en termes de rôles à aborder, il y a de quoi frémir! Sa mort d'Otello, où il assombrit artificellement son timbre, quasi barytonnant du coup, devrait le convaincre de ne pas s'y aventurer de sitôt. A signaler que le grave est aux abonnés absents de tout ce récital - preuve s'il en est que les rôles abordés (ou "à aborder) ne sont pas les bons.
Encore un ténor pour lequel je tremble!

Pour écouter ce récital: http://www.musicme.com/#/Compilation/The-Verdi-Tenor-0028947814443.html