Un grand mur coupe immédiatement l'entrée, mur constellé de casiers, éclairé faiblement...Dans la Nef du Grand Palais, glaciale en cette journée d'inauguration, des vêtements soigneusement disposés en carrés, entourés de poteaux reliés par des fils, au bruit incessant de coeurs qui battent...Plus impressionnant encore (voir photo), un grand tas de vêtements. A quoi penser, sinon à la Shoah? Les casiers peuvent contenir des affaires, des dents en or; les carrés de vêtements seraient des baraquements, et les coeurs qui battent seraient une façon de dire que, malgré le processus de déshumanisation en oeuvre, rien n'y fait: ce sont bien des hommes qui sont là, toujours vivants. Quelle puissance! Je précise que je suis ironique. Ces coeurs me dérangent particulièrement: j'y vois comme un rappel, une insistance, que la Shoah était une réalité. Comme si je ne le savais pas. Je trouve cela quasi indécent.
Se cacher derrière un message et un sujet totalement intouchables, voilà l'audace de
Christian Boltanski! Car où est l'artiste, où est son point de vue, où est sa sincérité? On la cherche vainement, en ressentant un malaise certain devant cette installation. Malaise de ne ressentir aucun sentiment, encore moins de l'empathie, pour les victimes auxquelles Boltanski prétend rendre hommage. Malaise de voir un sujet aussi grave et aussi complexe traité de manière aussi simpliste et impersonnelle. Malaise de devoir s'expliquer, se justifier, de ne pas avoir tellement apprécié cette édition de Monumenta. Car il FAUT aimer.
Certes, quelques images sont impressionnantes: ce mur à l'entrée, et ce tas de vêtements. Mais l'effet (y compris au niveau des dimensions) est totalement gommé par la présence du public...On se prend à "rêver" de pouvoir voir cette installation absolument tout seul...Puis l'on s'en retourne péniblement chez soi, se disant qu'on n'est qu'un sale élitiste snob.
Deuxième coup de craie de Beckmesser en peu de temps: attention, je redeviens méchant!
2 commentaires:
Je pense que j'aurais partagé ta réaction si j'avais eu le courage de m'y rendre. Tu n'es pas "méchant' seulement sincère.
Sur le moment, en entrant, ça m'a impressionné, puis j'ai trouvé cela vraiment facile et quasi-dérangeant, même.
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