mardi 12 janvier 2010

Tout est dans le titre (La Mélodie du Bonheur, Châtelet, 2 janvier 2010)


Quelle excellente idée de la part de Jean-Luc Choplin, directeur du Théâtre du Châtelet, que de programmer La Mélodie du Bonheur, comédie musicale à succès immortalisée par le film et la grâce de Julie Andrews, pour les fêtes de fin d'année! Compte-tenu de l'immense succès de l'oeuvre elle-même, la présenter dans des conditions satisfaisante aurait tout de même été une garantie pour contenter le public. Eh bien non, le Châtelet ne s'en est pas laissé compter, il a mis les petits plats dans les grands!
Emilio Sagi à la mise en scène, cela promettait du kitsch sucré comme on en attend peut-être dans cette oeuvre; le metteur en scène espagnol dépasse cela et réussit à coup sûr sa meilleure mise en scène au Châtelet, inspirée, regorgeant de bonnes idées (les portes du couvent qui s'ouvrent et se referment, le gazon comme sol unique, les lustres qui descendent du plafond pour le bal, la pente du décor qui suggère l'intrusion du monde extérieur mais aussi l'échappatoire pour la famille von Trapp...) et d'effets saisissants, notamment à la fin: lorsque le Capitaine von Trapp chante "Edelweiss", la salle du Châtelet est envahie de soldats nazis pointant leur arme vers le public; la famille s'échappe sous un drapeau nazi, qui finira englouti...Le tout fonctionne bien, est rythmé, bien dirigé (ce qui est souvent le point faible de ce metteur en scène) dans le détail, et relativement sobre.
Cette production est défendue par une équipe musicale irréprochable et d'un enthousiasme communicatif! Soulignons déjà que l'oeuvre de Rogers et Hammerstein fonctionne encore parfaitement; même si le public est légèrement dérouté par l'ordre des chansons (qui n'est pas le même que celui du film), la plupart sont archi-connues, émouvantes, draînent avec elle un lot de souvenirs d'enfance, et leur charme américano-viennois est absolument irrésistible. Ce n'était pas Sylvia Schwarz qui chantait cet après-midi là, mais Julie Fuchs, pleine de grâce et de fraîcheur. A côté, Rod Gilfry, en Capitaine von Trapp, faisait idéalement le personnage froid qui craque progressivement son armure, pour culminer sur un "Edelweiss" sur le fil de la voix, absolument bouleversant. De tous les rôles admirablement tenus, retenons la Mère Supérieure d'une bonté et d'une humanité renversantes de Kim Criswell, la Soeur Bertha drôlissime de Laetitia Singleton, le Max ambigu à souhait de Laurent Alvaro, le Rolf ardent de James McOran-Campbell, la Baronesse vénéneuse de Christine Arand, et la Liesl talentueuse et prometteuse de Karin Gilfry, la fille de Rod! Une équipe soudée comme une vraie troupe de comédie musicale, composée pourtant de chanteurs d'opéras, si bien qu'on se dit parfois que la sonorisation est presque superflue! Cette aide acoustique laisse à Kevin Farrell l'occasion de laisser sonner l'Orchestre Pasdeloup avec enthousiasme et générosité, et de révéler les sonorités à la Gershwin de la partition.
Il n'en fallait pas moins pour que le public soit totalement conquis, applaudissant tous les participants de ce très beau spectacle, au rythme du medley à l'orchestre à un rythme effréné! Idéal pour les fêtes, et pour retrouver, les larmes aux yeux, un peu (beaucoup?) de son enfance...
En voici un petit extrait:


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